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La composition de la musique du film "Sabah" par Christian Tramoni
--> Christian Tramoni, compositeur de musique de films, nous parle de son travail

Le travail effectué sur la bande originale de "Sabah" résulte avant tout d'une étroite collaboration entre Farid Lozès (réalisateur) et moi-même (Christian Tramoni). La composition de la musique de ce film, aurait était très difficile sans cette complicité et cette compréhension réciproque, ainsi qu'à la confiance qu'il m'accorde. Nous nous connaissons bien et j'arrive, la plupart du temps ,à comprendre ce qu'il veut!! Même si parfois il est difficile d'exprimer par des mots la musique que l'on a envie d'entendre... et encore plus difficile de traduire ces mots avec des notes de musique.

Mais nos interminables discutions autour du cinéma, de la musique en général, de la musique de film particulier nous ont données une base de donnée de références commune. Il lui suffit de me dire "tu sais dans tel film, telle scène, tu vois la musique.. le sentiment qu'elle évoque?" ou "tu vois chez tel ou tel compositeur l'ambiance qui se dégage ?". Et généralement ça marche!!!!! Sur Sabah le travail de la musique a été très intense puisque sur 40mn de film, 22mn sont illustrées musicalement : Plusieurs styles musicaux à composer, le mélange du documentaire et de la fiction, et en plus des scènes "Live" de concert à monter et organiser à partir de mes musiques. Et tout ça avec peu de temps et de moyens. Recréer un orchestre symphonique tout seul chez soi n'est pas toujours très évident...heureusement les outils informatiques ont considérablement évolués, rendant la tache plus facile. J'ai donc composé et programmé l'intégralité de la musique chez moi, et fait quelques prises de guitares et de oud chez Pierre Nicolas, dans son studio. Ce dernier a mixé toutes les musiques.

Sabah est , comme l'a nommé Farid Lozès, un "documenteur". C'est à dire une fiction empruntant au documentaire ses codes narratifs . Le pari de ce film était de mélanger la fiction et la réalité autant à l'image que sur le plan musical. Le récit se déroule dans le quartier Lamartia, un grand ensemble HLM de Villetigny-sur-Seine. Sabah est une jeune femme de 26 ans, fondatrice de l’association Malices qui dynamise le quartier autour de projets culturels. Une équipe de journaliste de la télévision vient faire un reportage sur cette association. Cette fiction met aussi en scène des jeunes artistes musiciens, rappeurs, d'autres ont le projet de réaliser un film sur leur cité. Le pari était d'être réaliste dans notre vision de la banlieue, sans la stigmatiser. La musique avait un rôle important. A la fois montrer les démarches musicales de ces jeunes artistes (dont je fais parti), donc filmer et mettre en place des scènes lives de concert réalistes (scène de concert sur la péniche), .... mais aussi composer une musique « cinématographique », c'est-à-dire orchestrale, pour les scènes d’émotions ou d’émeutes sans casser l’aspect documentaire du récit. Le mélange des genres: Le film se construit en 2 grandes parties. Dans la première ont fait connaissance avec Sabah , sa personnalité, ses préoccupations, l'association Malice et ses actions . Dans cette partie présent et passé se mêlent.....les interviews de Sabah sont alternés avec les témoignages de ses proches après son décès.....Dans la seconde ont bascule vers l'émeute, la mort de Sabah et les réactions suscitées par sa mort.

1° Partie du film

Il fallait donner dans un premier temps, un coté positif pour accompagner les scènes où les jeunes et Sabah étaient interviewés Nous ne voulions pas tomber dans les clichés habituels, à savoir coller un fond musical "Rap", lourd et sombre... Sabah et ses acolytes sont plein de vie et d'envies. Il fallait donc un "son" plus "enjoué"... qui avance, qui "donne la pêche"!!!! Des rythmiques plus "RNB"(sans l'être complètement non plus), avec des sonorités urbaines et ethniques reflétant le pluriculturalisme des banlieues. J'ai donc composé des musiques instrumentales en m'inspirant des productions anglo-saxonnes actuelles ... en y ajoutant ma touche personnelle. Une de mes préoccupations était de faire ressortir la personnalité de Sabah mais aussi ses origines maghrébines, sans non plus tomber dans la musique "arabisante". J'ai donc inclu dans l'orchestration un Oud( luth oriental) mais joué comme guitare " à l'occidental". Ces mêmes musiques ont étaient réutilisées lors du concert sur la péniche, servant d'"instrus" aux rappeurs venant faire le boeuf!!!!! Ceci est très important pour créer le lien entre la fiction et la réalité: on pourrait croire que ceux sont les membre de MALICES qui ont composé la musique du film. Dans cette même première partie, il fallait composer une musique qui marque le présent de la narration. C'est à dire : les témoignages des jeunes de la cité Lamartia, le personnage que joue Farid (ex- membre de l'assoc), du policier présent lors de l'émeute... Accompagner musicalement ces témoignages avait pour but de contraster avec les séquences de Sabah pleine vie, mais aussi de mettre le spectateur dans un climat d'attente au drame à venir. Pour cela Farid m'a beaucoup aidé en me donnant des indications très précises de ce qu'il voulait.... et en me glissant le nom de Philipe Glass... Une musique orchestrale qui nous sort de la réalité sans non plus nous plonger trop dans la fiction. Une musique sombre sans non plus être trop noire...une musique qui nous dit: "quelque chose s'est passé.... on va vous le montrer!"

2° Partie du film

-L' émeute: Au départ aucune musique n'était prévue pour cette scène. La violence des images suffisait à elle-même. Au fur et à mesure que le montage avançait, Farid senti la nécessité d'ajouter une émotion supplémentaire. Il fallait mettre en avant la stupidité de cette tragédie : pendant que les jeunes empêchent les pompiers d'arriver, une jeune femme est en train de perdre la vie. La musique ne devait pas accentuer la violence des images, mais au contraire traduire le drame, la tragédie qui se dérouler hors champs : Sabah est en train de mourir. Plusieurs sentiments subtils devaient être mêlés: la tension, la tristesse, la lourdeur, le drame, mais aussi l'évocation d'une âme qui s'en va. Et tout ceci en respectant l'évolution de la scène à l'écran... La musique colle à l'action qui nous est montrée mais en même temps crée un décalage quand aux sentiments exprimés par celle-ci. Cette partie musicale est relativement courte, mais à été pour moi l'une des plus difficile à composer. Il suffit de peu pour être hors sujet!!!! La difficulté était non pas de créer une musique décalée, mais une musique qui traduit et mélange plusieurs sentiments à la fois en suivant la dramaturgie de la scène sans surligner ce qui n'a pas besoin de l'être...

-La mort de Sabah:

La scène parle d'elle-même : une jeune femme est morte, ou presque. L'équipe du SAMU est là, mais impuissante, tout comme ses proches et les badauds venus assister au drame. La scène est dure. Qu'est ce que la musique peut amener de plus à l'intensité de cette scène? Faut-il encore sortir les violons??? Le choix, du Oud, une nouvelle fois n'est pas anodin. Cet instrument seul nous ramène à la réalité, à l'humain.... L'impression que quelqu'un ailleurs, joue pour elle. Le thème utilisé au début est le même que celui de l'"hommage" suivi par une mélodie rappelant une musique traditionnelle saharienne. Le son du Oud donne une dimension un peu spirituelle et décalé à cette scène. Cela permet aussi de soulager le spectateur, de ne pas le mettre encore plus mal à l'aise par rapport à la dureté et la violence des images. -L'hommage à Sabah: La musique de l'hommage est une pièce musicale interprétée seule à la guitare en publique et composée spécialement pour cette scène. Initialement il était prévu une chanson "chorale" RNB, interprétée en live avec une groupe et plusieurs chanteurs et chanteuses.... mais par manque de temps, et de budget, car très audacieux et difficile à réaliser techniquement. Ainsi, 3 semaines avant le tournage de la scène ont a décidé de faire l'inverse!!!!! Un seul musicien et une guitare.... beaucoup plus facile à réaliser techniquement.... mais beaucoup plus difficile pour moi!!!! mais j'ai relevé le défi... non sans appréhensions. Il fallait non seulement composer une musique qui corresponde à l'émotion voulue au départ, celle d'un hommage rendu à une personne proche récemment disparue, une communion avec l'ensemble des proches, mais en plus un musique "cinématographique"!!!! et tout ça seulement avec une guitare, et interprété en "live"... L'atmosphère durant le tournage était très particulière. Tout le monde habillé en noire, des femmes et des hommes avec les larmes aux yeux, tous autour de moi, et les photos de Sabah qui défilaient derrière moi. Je pense que peu de musiciens ont vécu ça dans leur carrière! Ca m'a beaucoup aidé... et je suis très fière d'avoir pu le réaliser. C'est un petit cadeau que m'a fait Farid...

-Le générique de fin : On voulait qu'il soit pêchu, et qu'il mélange la musique moderne à la musique cinématographique, donnant à cette fin un coté positif... mais que si l'on ne fait pas gaffe, l'avenir peu s'assombrir. Il résume le film: la volonté d'avancer et de se battre, la pêche des jeunes, mais aussi la violence, la tension et le drame qui peu arriver à tout moment. Cette musique fait référence à plusieurs compositeurs qui me sont chers comme John Barry, Ennio Morricone, mais aussi des groupes comme Deep Purple ou Jamirocaï... le mélange est intéressant.

2. Techniques de composition La difficulté dans ce genre d'exercice est de traduire avec des sons, des rythmes, des notes de musique, les sentiments qui manquent à l’image, Ce que les mots et les images ne peuvent pas dire, c'est à la musique de nous les faire ressentir, de nous les faire comprendre. Le principale du travail réside à déterminer les sentiments qui manquent à l'image, ou qui la complémentent. Et quel sentiment il est le plus judicieux de mettre en avant. Qu'est ce que la musique doit apporter? De quel sentiment a-t-on besoin pour que cette scène fonctionne? La difficulté réside donc pour le compositeur, d'exprimer des sentiments qui lui sont imposés par l'histoire, et non pas l'inverse. Tout comme l'acteur doit se mettre au service du film, et du réalisateur, il en est de même pour le compositeur. Cela n'empêchera ni l'un ni l'autre d'y mettre un peu de leur personnalité, d'aller puiser leurs sentiments au plus profond de eux-mêmes... mais c'est l'histoire qui prime avant tout. Il ne s'agit donc pas d'imposer sa musique selon ses inspirations. En ce qui me concerne je peux passer plusieurs jours sans toucher à un instrument. Tant que la musique n'est pas composée dans ma tête, tout au moins l'idée principale, je ne fais rien.... jusqu'au moment où je la sent prête à sortir.... et là je ne m'arrête plus tant qu'elle n'est pas terminée....C'est souvent après de longues discutions avec Farid que les idées de musique me viennent. Le pari est toujours de pouvoir recréer ce qu'on a dans la tête avec les moyens mis à disposition. Recréer l'effet d'un orchestre symphonique avec un simple ordinateur, un groupe qui groove avec seulement une guitare et une boite à rythme!!!!!!! Mais jusque là ont s'en est bien sorti.... avec un peu d'imagination et du savoir faire et beaucoup de passion, on arrive à tout!!!!!!

Christian Tramoni

Ecrit par Christian Tramoni, à 08:21 dans la rubrique "Actualités".

Commentaires :

  Anonyme
21-03-06
à 15:20

Lien croisé

« SABAH » - un film de Farid Lozès : " Droits musicaux : Christian Tramoni (interview) "

  Anonyme
12-05-06
à 09:05

Lien croisé

« SABAH » - un film de Farid Lozès : " Droits musicaux : Christian Tramoni (interview) "



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